Les soignants ont retrouvé cette lettre sous son oreiller après son décès…02-2OO2
Que vois-tu, toi qui me soignes,
que vois-tu ?
Quand tu me regardes,
que penses-tu ?
Qui docile ou non,
te laisse faire à ta guise,
le bain et les repas pour occuper la longue journée.
C'est ça que tu penses,
c'est ça que tu vois ?
Alors ouvre les yeux,
ce n'est pas moi.
Une jeune fille de seize ans,
des ailes aux pieds,
rêvant que bientôt elle
rencontrera un fiancé…
Déja vingt ans,
mon coeur bondit de joie
au souvenir des voeux que j'ai fait ce jour-là.
Une femme de trente ans, mon enfant grandit vite;
nous sommes liés l'un à l'autre par des liens qui dureront…
Quarante ans, bientôt il ne sera plus là,
mais mon homme est à mes cotés et veille sur moi.
Cinquante ans,
à nouveau jouent autour de moi des bébés.
Nous revoilà avec des enfants,
moi et mon bien-aimé.
Voici les jours noirs, mon mari meurt.
et je pense aux années et à l'amour que j'ai connus.
Je suis vieille maintenant et la vie est cruelle
et elle s'amuse à faire passer la vieille pour folle.
Mon corps s'en va.
Grâce et forme m'abandonnent.
Et il y a une pierre là où jadis il y avait un coeur.
Mais dans cette vieille carcasse,
la jeune fille demeure.
Le vieux coeur se gonfle sans relâche.
Je me souviens des joies et des peines.
Alors, ouvre les yeux, toi qui me regarde et qui me soigne.
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